Maladies des valves cardiaques
Le traitement antibiotique du rhumatisme articulaire aigu, grand pourvoyeur de valvulopthies, a modifié notablement la répartition des causes de valvulopathies, mais celles-ci restent fréquentes. Depuis 2010, l’implantation percutanée de prothèses valvulaires aortiques (TAVI) a fait évoluer le traitement des patients à haut risque chirurgical.
Les valvulopathies cardiaques (ou maladies valvulaires cardiaques) désignent les maladies ou dysfonctionnements qui touchent les valves du cœur.
Les valves cardiaques sont des structures élastiques composées de deux ou trois valvules. Leur rôle est d’empêcher le sang de refluer d’un ventricule vers une oreillette ou d’une artère de sortie du cœur (aorte ou tronc pulmonaire) vers un ventricule.
Le cœur comporte quatre valves :
- La valve mitrale sépare l’oreillette gauche du ventricule gauche.
- La valve aortique sépare le ventricule gauche de l’aorte.
- La valve tricuspide sépare l’oreille droite du ventricule droit.
- La valve pulmonaire sépare le ventricule droit de l’artère pulmonaire.
En savoir plus Anatomie du cœur
Le fonctionnement des valves peut être anormal de deux manières :
- Le sang circule moins bien à travers la valve dont l’ouverture est réduite : on parle de rétrécissement ou sténose valvulaire.
- Du sang reflue à cause d’un défaut d’étanchéité de la valve : on parle d’insuffisance ou fuite valvulaire.
Les deux types de dysfonctionnement peuvent coexister sur une même valve : on parle de maladie valvulaire (par exemple, maladie mitrale pour indiquer qu’il existe à la fois un rétrécissement et une insuffisance de la valve mitrale).
Toutes les valves peuvent être atteintes par ces dysfonctionnements. Les valvulopathies les plus fréquentes dans les pays occidentaux sont le rétrécissement aortique et l’insuffisance mitrale.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
Les causes des valvulopathies varient en fonction de la valve atteinte (aortique, mitrale, etc.) et du type de dysfonctionnement (rétrécissement ou insuffisance).
Les causes les plus fréquentes sont les suivantes.
- Causes dégénératives : ce sont les causes les plus fréquentes dans les pays occidentaux. Leur fréquence augmente avec l’âge mais elles peuvent également toucher le sujet jeune.
- Rhumatisme articulaire aigu : c’est une cause devenue moins fréquente dans les pays occidentaux depuis l’utilisation large des antibiotiques. Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) est une complication rare d’une infection bactérienne à streptocoque (par exemple, une angine à streptocoque) survenue dans l’enfance et insuffisamment traitée. Le RAA se manifeste par des douleurs articulaires et de la fièvre. Le RAA peut parfois être à l’origine d’atteintes cardiaques, en particulier au niveau des valves cardiaques. La valvulopathie la plus fréquemment causée par le RAA est le rétrécissement mitral.
- Malformations congénitales : les valvulopathies peuvent être la conséquence de malformations congénitales, c’est-à-dire des malformations présentes dès la naissance. La plus fréquente des malformations valvulaires congénitales est la bicuspidie aortique : la valve aortique comporte alors deux valvules au lieu de trois ce qui augmente le risque de développer une valvulopathie aortique (en particulier un rétrécissement aortique) à l’âge adulte.
- Infections : les endocardites infectieuses sont des infections le plus souvent bactériennes touchant les valves ou la paroi interne des cavités cardiaques. Ce sont des maladies relativement rares mais pouvant être très graves.
- Infarctus du myocarde : l’infarctus du myocarde peut être à l’origine d’une insuffisance mitrale dite fonctionnelle car la fuite est la conséquence de l’atteinte du ventricule gauche.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
Au début de leur évolution, les valvulopathies sont le plus souvent asymptomatiques, c’est-à-dire que le patient ne ressent aucun symptôme.
En cas de valvulopathie évoluée ou compliquée, des symptômes peuvent apparaître. Ils dépendent du type de valvulopathie et de son degré de sévérité.
- Essoufflement à l’effort le plus souvent.
- Douleur thoracique à l’effort en cas rétrécissement aortique serré.
- Malaise voire perte de connaissance.
- Palpitations.
- Œdèmes des membres inférieurs.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
La principale complication des valvulopathies est la survenue d’une insuffisance cardiaque.
D’autres complications sont possibles :
- Troubles du rythme cardiaque : des troubles du rythme cardiaque (en particulier extrasystoles auriculaires, voire fibrillation auriculaire) peuvent survenir en cas de valvulopathie évoluée, notamment mitrale.
- Endocardite infectieuse : la présence d’une valvulopathie est un facteur de risque d’endocardite infectieuse. L’origine de l’infection est le plus souvent un germe issu de la peau (staphylocoque) ou de la bouche et des dents. Maintenir une bonne hygiène cutanée et bucco-dentaire est donc très important.
- Accident vasculaire cérébral : le rétrécissement mitral serré est à l’origine d’une stase sanguine dans l’oreillette gauche, augmentant le risque de formation d’un caillot dans l’oreillette pouvant migrer et entraîner un AVC par embolie artérielle.
- Mort subite, surtout en cas de rétrécissement aortique.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
L’examen clinique permet le plus souvent de retrouver un souffle cardiaque à l’auscultation du cœur. C’est le reflet des turbulences du flux sanguin causées par le dysfonctionnement valvulaire.
L’examen complémentaire essentiel au diagnostic des valvulopathies est l’échographie cardiaque. Cet examen d’imagerie non irradiant, pratiqué par un cardiologue, permet de confirmer la présence de la valvulopathie, d’en préciser le diagnostic, d’apprécier sa gravité et son retentissement sur la fonction du cœur, de donner des éléments sur sa cause et de rechercher d’éventuelles lésions associées.
D’autres examens complémentaires peuvent être utiles au diagnostic ou à la recherche de complications des valvulopathies : radiographie du thorax, électrocardiogramme (ECG), plus rarement scanner ou IRM cardiaque, et enfin coronarographie (examen invasif pratiqué avant une intervention chirurgicale pour remplacement valvulaire).
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
La prise en charge des valvulopathies peut aller d’une simple surveillance cardiologique régulière à une intervention de correction ou de remplacement valvulaire.
Il n’existe pas actuellement de traitement médical permettant de ralentir l’évolution des valvulopathies dégénératives.
Les interventions sur les valves cardiaques consistent à remplacer la valve atteinte par une prothèse ou à réparer la valve atteinte (plastie valvulaire). Une intervention est indiquée en cas de valvulopathie évoluée et ont pour objectif d’éviter la survenue de complications, en particulier d’une insuffisance cardiaque.
L’indication dépend d’une analyse du rapport entre les bénéfices attendus de l’intervention et les risques de complications et les inconvénients à long terme.
Ces interventions sont le plus souvent effectuées par voie chirurgicale, ce qui nécessite une ouverture du thorax. Dans certaines situations des interventions par voie percutanée (sans ouvrir le thorax) peuvent être proposées, en particulier en cas de rétrécissement aortique.
Les prothèses valvulaires peuvent être soit mécaniques, soit biologiques (ou bioprothèses). Les prothèses mécaniques actuellement utilisées sont composées de deux ailettes en carbone. Des modèles plus anciens sont composés d’un disque et d’une bille. Les bioprothèses sont constituées de tissus d’origine animale traités chimiquement.
Les prothèses mécaniques ont l’avantage d’être plus durables que les bioprothèses mais l’écoulement du sang étant moins physiologique, elles nécessitent un traitement anticoagulant au long cours.
Un traitement antibiotique préventif (ou antibioprophylaxie) peut être indiqué afin de limiter le risque d’endocardite infectieuse.
Ce traitement est recommandé uniquement en cas de geste à haut risque (en particulier certains gestes bucco-dentaires invasifs) chez les patients à haut risque d’endocardite infectieuse (patients porteurs de prothèses valvulaires, antécédent d’endocardite infectieuse, cardiopathie congénitale sévère). Il s’agit d’une dose unique d’antibiotique à prendre 30 à 60 minutes avant le geste.
Dans tous les cas, il est très important de maintenir une bonne hygiène cutanée et bucco-dentaire et d’avoir un suivi dentaire régulier pour prévenir le risque de survenue d’une endocardite infectieuse.
Un traitement anticoagulant est nécessaire dans certaines circonstances, essentiellement après remplacement valvulaire par une prothèse mécanique (voir plus loin).
En cas de complication, un traitement spécifique est indiqué : traitement d’une insuffisance cardiaque, traitement d’une fibrillation auriculaire, etc.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
Un traitement anticoagulant est indiqué essentiellement après remplacement valvulaire par une prothèse mécanique. Les prothèses mécaniques nécessitent un traitement anticoagulant à vie.
Un traitement anticoagulant est également indiqué dans les 3 mois post-opératoires qui suivent un remplacement valvulaire mitral par une bioprothèse ou une réparation valvulaire mitrale.
Chez les patients porteurs de bioprothèses valvulaires ou après réparation valvulaire, un traitement anticoagulant au long cours n’est nécessaire qu’en cas de maladie associée, le plus souvent une fibrillation auriculaire ou un antécédent d’embolie.
Les valvulopathies non opérées ne nécessitent pas de traitement anticoagulant sauf s’il existe une maladie associée, le plus souvent une fibrillation auriculaire ou un antécédent d’embolie.
Le rétrécissement mitral expose à un risque d’embolie plus élevé que les autres valvulopathies.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
Le traitement anticoagulant oral de référence des valvulopathies repose sur la famille des anti-vitamines K (AVK). En savoir plus Classification des anticoagulants
Les objectifs d’INR sont habituellement un INR cible à 2,5 (avec un intervalle thérapeutique entre 2,0 et 3,0). Pour certaines prothèses valvulaires mécaniques, l’INR cible peut être plus élevé, jusqu’à 4,0 (avec un intervalle thérapeutique entre 3,5 et 4,5). En savoir plus TP/INR
Les anticoagulant oraux directs (AOD) ont une autorisation de mise sur le marché (AMM) réservée aux fibrillations auriculaires non valvulaires.
En pratique, leur utilisation est possible pour les valvulopathies non opérées suivantes : rétrécissement aortique, insuffisance aortique, insuffisance mitrale. En revanche, les AOD sont contre-indiqués en cas de rétrécissement mitral et après remplacement valvulaire quel que soit le type de prothèse et quelle que soit la valve concernée.
Auteur : Pr Laurent FAUCHIER (cardiologie)
Date de publication : 22/09/2016
Date de dernière mise à jour : 16/11/2016
Le remplacement percutané de la valve aortique, communément appelé Tavi (transcatheter aortic valve implantation), est un traitement du rétrécissement aortique serré.
Le rétrécissement aortique
La valve aortique, placée entre le ventricule gauche et l’aorte, empêche le sang de refluer dans le ventricule après que celui-ci a éjecté le sang dans l’aorte. Le rétrécissement aortique peut être acquis ou congénital. Le dépôt de calcium sur la valve dû au vieillissement est la cause la cause la plus fréquente. Elle touche préférentiellement les personnes de plus de 75 ans. Le rhumatisme articulaire aigu qui peut survenir après une angine bactérienne mal soignée est devenu rare depuis l’utilisation des antibiotiques. La malformation congénitale de la valve (bicuspidie) conduit au rétrécissement aortique chez des sujets plus jeunes. Les symptômes surviennent avant tout à l’effort : dyspnée d’effort, angor d’effort, syncope d’effort. La valve qui fonctionne mal du fait de son rétrécissement fatigue le cœur et conduit à l’insuffisance cardiaque, aux troubles de la conduction ou du rythme ou encore à la mort subite. La maladie évolue lentement et silencieusement. Quand des symptômes cliniques apparaissent, le pronostic est mauvais, avec une survie à 5 ans de 32 %. Le traitement du rétrécissement aortique consiste au remplacement de la valve, soit par voie chirurgicale (à cœur ouvert), soit par voie percutanée (Tavi).
Historique
Compte tenu du risque de la voie chirurgicale lié à l’âge ou à des comorbidités, certains patients pouvaient être déclarés inopérables avec, de fait, un mauvais pronostic à court terme. C’est ainsi que la valvuloplastie aortique à ballonnet, consistant à simplement élargir la valve calcifiée avec un cathéter à ballonnet, a été testée mais avec des résultats décevants. Le professeur Alain Cribier, chef du service de cardiologie du CHU de Rouen, eut alors l’idée de placer au sein de la valve calcifiée un stent expansible à ballonnet contenant une prothèse valvulaire. Après des essais réalisés en 1994 sur des pièces anatomiques montrant la faisabilité de la procédure, il fonde sa propre start-up avec une entreprise israélienne. Après des expérimentations animales, la première procédure sur un patient inopérable et dans un état critique a lieu le 16 avril 2002, avec succès. La start-up est ainsi rachetée par la multinationale américaine Edwards Lifesciences en 2004 qui améliore le dispositif et impose la technique dans le monde entier.
La technique
Le Tavi est réalisé à l’aide d’un dispositif médical placé dans un cathéter. La prothèse valvulaire est replié dans un treillis métallique appelé stent et placée au niveau de la valve pathologique au moyen du cathéter. La prothèse valvulaire est alors déployée dans la valve aortique calcifiée en l’écrasant de façon centrifuge, au moyen d’un ballonnet situé au bout du cathéter, à l’intérieur du treillis, et gonflé sous forte pression. Il existe aussi des prothèses auto-expansibles. Le cathéter est introduit généralement sous anesthésie locale par l’artère fémorale au niveau du pli de l’aine pour aller en passant par l’aorte jusqu’au cœur. Les suites sont généralement simples, le patient pouvant revenir à domicile rapidement avec une prescription d’aspirine au moins pour trois mois.
Le contexte réglementaire
La loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale encadre « la pratique des actes, procédés, techniques et méthodes à visée diagnostique ou thérapeutique, ainsi que la prescription de certains dispositifs médicaux susceptibles de présenter, en l’état des connaissances médicales, des risques sérieux pour les patients ». Celle-ci est soumise à la formation et la qualification des professionnels pouvant les prescrire ou les mettre en œuvre et aux conditions techniques de leur réalisation, après avis de la HAS. La loi du 21 juillet 2009 dite HPST remplace la notion de risque pour le patient par la nécessité « d’un encadrement spécifique pour des raisons de santé publique ou susceptibles d’entraîner des dépenses injustifiées ». L’arrêté du 31 décembre 2009 établit la liste des 33 établissements de santé autorisés à pratique le Tavi pour une durée de 2 ans. Cette liste sera révisée régulièrement. Les établissements doivent pratiquer un nombre d’actes minimum chaque année et être autorisés à pratiquer la chirurgie cardiaque et la cardiologie interventionnelle dans le même bâtiment. Les dispositifs médicaux utilisés pour le Tavi pris en charge par l’assurance maladie font également l’objet chacun d’un arrêté des ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et des finances, qui précise les indications et les conditions de prescription et d’utilisation du dispositif. Aujourd’hui, 16 types de dispositifs médicaux fabriqués par Abbot, Boston Scientific, Edwards Lifesciences et Medtronics, toutes américaines, sont pris en charge par l’assurance maladie.
L’évolution de la pratique du Tavi
Selon la HAS, de 2015 à 2022, 102.668 Tavi ont été réalisés en France, passant de 6.900 en 2015 à 18.500 en 2022. Corrélativement, le nombre d’actes chirurgicaux est passé de 16.300 en 2015 à 12.000 en 2022.
Auteur : Dr Gérard Berthier
Date de publication : 10/08/2024
Date de dernière mise à jour : 10/08/2024